Le four à pain du village de Kerlaër a résisté au bombardement.
Trous de bombes.
La tuilerie du Fresne à Argences (1841-1983).
Les rares traces de vie humaine du village de Kerlaër se trouvent dans les recensements administratifs. 1911 : 8 familles dans 8 fermes regroupées dans le hameau. Les familles Gourmelen, Chapuis, Leroux, Thomas, Mauguen, Le Du, André, Losser. Les hommes essentiellement cultivateurs ou jardiniers au service comme quelques femmes cuisinières auprès de familles aisées de Roscanvel. Il faut noter la présence d'un domestique, d'une pupille ! Puis aussi d'un enfant de 14 ans déclaré cultivateur. Henri Reopars, né à Brest en 1898, qualifié de domestique en 1911, soit à 13 ans ? La famille Gourmelen au 19ème siècle est l'une des familles les plus imposées de Roscanvel.
La pointe de Roscanvel, avant qu'elle ne devienne une zone
militarisée était une terre libre à la réputation exécrable. On parlait
alors de brigandage. Au Moyen-Age, il se dit que des marins de Roscanvel
allaient rançonner les navires de passage qui en navigant dans le Goulet
de Brest prenaient moult précautions pour éviter de se drosser sur les
récifs. Il suffisait de quelques barques, d'une bonne connaissance de
la Rade de Brest et de l'anse de Camaret pour dépouiller les vaisseaux.
Progressivement, l'anse de Camaret est devenue une station de mouillage
de réputation mondiale. Les navires marchands, toujours plus grands, venaient
s'y réfugier en attendant les conditions de navigation favorables pour,
soit passer le Goulet et décharger leurs cargaisons à Brest, soit repartir
au large une fois le temps apaisé. Le village de Kerlaër - laer = voleur
- était localisé sur les hauteurs des falaises de Roscanvel face au vestibule
du Goulet.
Les habitants mi-pêcheurs, mi-agriculteurs vivaient dans le dénuement
et n'attendaient qu'une chose, une belle tempête, ce fameux coup de chance
pour qu'il y ait un naufrage fructueux. En un siècle, au 18ème, il y en
eut une quarantaine. 40 navires de commerce plus ou moins chargés de marchandises
venant se fracasser au pied de la falaise suite à un mauvais coup de vent
et c'était alors que les coureurs (habitants venant récupérer les biens)
dévalaient de partout pour emporter tout ce qui était transportable. Il
fallait se démener vite, il n'y en aurait pas pour tout le monde et la
marée pouvait disperser les "trésors". Après la cargaison, on
prélevait aussi les cordages, les voiles et les bois du navire, pour la
maison, le chauffage ou la revente... Question revente, il n'y avait pas
le choix, tout devait passer entre les mains du Camarétois Torrec de Bassemaison
qui avait le monopole des transactions sur les naufrages. Qu'importe,
les quelques pièces étaient toujours bonnes à prendre.
L'administration s'en mêla et organisa les récupérations. Pour éviter
les pillages anarchiques et que l'argent ne tombât pas exclusivement dans
les mains privées de la noblesse locale, les épaves furent gardées et
la population dû s'organiser avec méthode pour être rémunérée pour son
travail. Des enchères publiques étaient organisées à Brest. Cette rationalisation
ne déplut pas forcément car des charpentiers travaillaient à la déconstruction,
cela se faisait avec de la main d’œuvre durant des mois. Tout le monde
y trouvait son compte et les équipages étaient nourris et logés provisoirement
à Roscanvel ce qui amenait de l'argent supplémentaire aux hébergeurs.
Après la Révolution française, la navigation va devenir plus avisée, surtout
au 19ème siècle avec la motorisation et l'abandon de la marine à voile,
les naufrages seront plus rares, de moindre importances, ou purement militaires
et la militarisation de la presqu'ile de Roscanvel amènera d'autres revenus
plus réguliers, de sorte que Kerlaër ne sera plus le village des voleurs
mais celui de la TSF. L'armée française occupe désormais les terres et
vit en parallèle avec la population civile jusqu'à ce que stratégiquement
les positions défendues des batteries côtières soient plus ou moins déclassées.
Aménagement supplémentaire, la construction de la caserne
de Kerlaër qui ne dura qu'un quart de siècle environ.
La seconde guerre mondiale amènent une invasion d'installations allemandes
- Stutzpunkt - en soutien du port de Brest. Kerlaër est l'un des villages
entièrement détruit par des bombardements alliés de haute altitude en
1944 afin de préparer la libération. Un couple qui s'était abrité dans
de la paille est victime des éclats. Le village avait été heureusement
évacué par précaution. En effet, les autorités allemandes proposent à
la population de s'abriter dans la batterie basse de Cornouaille sachant
que l'artillerie américaine de Plougastel-Daoulas intensifie son feu sur
la batterie de Cornouaille aidée par des bombardements aériens ravageurs.
La Flak (artillerie antiaérienne allemande) riposte avec l'aide de l'éclairage
de ses projecteurs en cours de nuit. Quelques curieux assistent à distance
à l'évènement sensationnel. Lors des journées du 25/26 août 1944 ce n'est
plus Cornouaille qui est seulement touché mais le village tout entier
quelques minutes après le hameau de Trévarguen.
Au matin, les habitants constatent que la vie sur place n'est plus possible,
il faut partir. La population est recueillie au village de Dinan pour
beaucoup. Dans les jours qui suivirent, les batteries allemandes cessèrent
de combattre : militairement la mission est réussie.
Après guerre, bien qu'un temps envisagé, le village n'est pas reconstruit.
Le cœur n'y est pas. L'argent est prioritaire pour la commune de Roscanvel
qui a beaucoup souffert et la crainte de munitions non explosées dans
le sous-sol n'invite pas à l'enthousiasme. De plus, après guerre, les
commissions décidant des aides financières à la reconstruction proposent
des sommes dérisoires au vu de la vétusté des bâtiments du village. Des
fermes de plus d'un siècle ne valent pas lourd. Une page se tourne, le
village des voleurs n'est plus qu'une terre agricole humide traversée
par la route de Kerlaër. Le maire de l'époque pratique un remembrement
et distribue les terres à l'abandon à des familles de Roscanvel en difficulté.
La batterie cible était le point de défense allemand Cr336 Ebbstrom. La mission fut déclenchée par les forces américaines du Lieutenant-General Middleton dans le cadre des bombardements des 25 et 26 août 1944 afin d'affaiblir les forces allemandes du siège de Brest.
48° 19' 46.6" N
4° 33' 47.4" O
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