Le sous-préfet de 2ème classe Jean Moulin (1899-1943) est
nommé à Châteaulin de 1930 à 1932 grâce à Charles Daniélou (homme politique,
journaliste, poète, romancier 1878-1953), maire de Locronan mais aussi
ministre à plusieurs reprises - Jean Moulin l'avait soutenu pour la députation
finistérienne. Le haut-fonctionnaire a l'occasion de visiter la presqu'île
de Crozon autant professionnellement qu'à titre privé. Son intérêt pour
la littérature et le dessin - la caricature tout particulièrement - ne
peut que le mener dans le saint des saints de la culture camarétoise de
l'époque : le manoir
du Boultous - de Coecilian - du poète Saint Pol Roux. Augustin Tuset
(médecin artiste résistant 1893-1967) fait partie de cette élite intellectuelle
et multiplie les rencontres avec Roger-Louis Pillet (poète journaliste
critique d'art 1897-1966) entre autres. Ce dernier reconnaît un talent
évident de dessinateur à Jean Moulin (sous le pseudonyme Romanin). Max
Jacob fait aussi partie des relations incontournables comme de nombreux
artistes de l'époque. Découvertes artistiques multiples pour le jeune
sous-préfet et développement de l'esprit politique aussi... Jean Moulin
agace le préfet du Finistère Marie Denis Eugène Louis Mage (ancien préfet
de la Haute-Vienne), les frictions deviennent permanentes... Le passage
de Jean Moulin en Bretagne fut donc formateur assurément.
Pierre Cot, radical-socialiste, ami de Daniélou, nomme Jean Moulin chef adjoint de son cabinet aux Affaires étrangères sous la présidence de Paul Doumer en décembre 1932. Le sous-préfet reste en fonction à Châteaulin sans y être, le nouveau préfet Charles Marie Etienne Larquet (nommé en octobre 1932 - ancien préfet des Vosges), adversaire politique, met des bâtons dans les roues de Moulin. Moulin renonce à la politique parisienne et se voit nommé sous-préfet à Albertville.
Après sa mutation, les échanges entre amis se poursuivent par lettres postales par exemple. Au delà des rencontres souvent amicales, avec la venue des temps de guerre, les liens deviendront plus forts pour chacun. La guerre, la résistance, la torture et la mort, pour un Jean Moulin dont Pillet disait haut et fort : " ... Jean Moulin était un démocrate, un laïque intégral. [...] Je suis en tout cas persuadé que Jean Moulin, s'il avait survécu, eût été l'adversaire le plus déterminé de la politique gaulliste. Il n'aurait pu admettre cette monarchie facilement imposée, d'ailleurs, à un peuple aveuli et crétinisé par le Tiercé, les sports et le cléricalisme." Augustin Tuset fit quant à lui des sculptures de Jean Moulin, pour perpétuer le souvenir d'un être entier qui venait aussi en famille, avec ses parents et sa sœur, à Camaret-sur-Mer à une époque sans doute heureuse, du moins sans lutte sacrificielle pour la liberté.
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